© Jan R. Faust

Jan R. Faust
Past Increasing

Commissariat
Vincent Gobber

Montage du 9 au 12 septembre 2024

Exposition du 13 sept. au 19 octobre 2024
Vernissage le jeudi 12 septembre à partir de 18h

Biennale d’art de Lyon

L’artiste français Jan Raymond Faust, également connu sous le nom de Yannick Demmerle, réside dans la région d’Oberkirch au cœur de la Forêt-Noire. Né en 1969, il a commencé sa carrière artistique en tant que photographe après avoir obtenu son diplôme de l’ESAD de Strasbourg en 1996. Pendant une décennie, c’est en Tasmanie, qu’il a vécu une période marquante de son parcours.
Sa pratique photographique s’achève en 2009, il procède ensuite à une transformation complète de son identité artistique. En renonçant à la photographie et en adoptant un pseudonyme, il se consacre d’abord au dessin, puis au collage, exprimant avec une énergie libératrice des influences surréalistes. Ses dessins d’une grande finesse, réalisés avec une pointe de graphite, nécessitent une observation attentive. Les traits délicats, parfois à peine esquissés, requièrent une approche au plus près pour saisir la richesse de son univers foisonnant. Des chimères s’entrelacent dans une multitude de formes animales, souvent puisées dans l’imaginaire des forêts d’Europe centrale, capturées à travers son objectif pendant de nombreuses années. Son amour de la littérature se manifeste par des emprunts à Céline ou Schopenhauer, subtilement intégrés à ses dessins.
Les œuvres de Jan R. Faust appartiennent à de nombreuses collections internationales, publiques et privées, notamment au Centre Pompidou, au Museum of Old and New Art (MONA) à Hobart en Tasmanie, au MONAD Contemporary Art à Genève en Suisse, au musée de Strasbourg et au FRAC Picardie.


Le jus de poubelles
Jan R. Faust

« L’écriture est une activité à laquelle je répugne et je n’ai jamais écrit le moindre poème. Les évènements les plus insensés, les plus invraisemblables sont de natures incommunicables et sont tout simplement impossibles à raconter : qui pourrait, avec les pauvres mots de notre langage, donner plus qu’un ersatz (modéré) de l’inexplicable ? J’ai fais de considérables progrès dans ma connaissance de la nature humaine. Ce qui a dévasté mon travail, embrasé mes motivations et je suis aussi sûr que certain qu’il n’y a rien à espérer de l’humain : “comme dans un naufrage, chacun pour soi !” (Marcel Duchamp) — “amoureux” ou socialiste, ou pas, Pape, Wikileaks, artiste fonctionnaire, “ami” ou pas, curateur, philanthrope, djihadiste ou professeur, Charlie, Facebook ou rien : c’est chacun pour soi (comme sur “le radeau”…) 

Sans y prêter la moindre attention, je n’ai cédé dans mon travail qu’à l’impulsion qui me poussait en avant et je n’ai poursuivi d’autre but que celui d’approfondir ma pratique, d’apprendre encore et de me surprendre plutôt que de reproduire ad vitam æternam un “savoir faire” lénifiant mais alléluié, pire, de me prélasser dans une habileté éclatante : je conteste l’idée du beau éternel et “intemporel”. Avec le temps, j’ai surtout appris à abhorrer le réalisme absolu et instantané. Confronté aux facultés du cerveau humain, il apparait comme une bien godiche idole : l’imagination est notre destin, c’est le mien et ça le restera quoi qu’il arrive. 

Bien que la photographie ne soit pas vraiment un art, mais de la pauvreté instaurée en grandeur et un simple procédé mécanique dont il est possible d’inculquer les principes essentiels à un individu moyen en une quinzaine de jours, elle occupa pourtant une quinzaine d’années de ma vie. Si l’on y regarde bien, tout cela n’était qu’une phase, comme la jeunesse ! J’avais, après toutes ces années “snap-clic”, la tête et les membres lourds comme si on m’avait bourré les veines avec du sable et accroché une ancre dans le dos, et une bien pesante… Il était temps que cet égarement photographique se désagrège et finisse par cadavérer. Il était temps surtout de faire table rase, de tout démolir pour reprendre à zéro, pour penser et reconstruire d’une manière fulminante, en créant des images qui soient visuellement les plus puissantes possibles, des images qui provoquent l’effroi ou/et le rire, ou/et le dégoût, ou/et l’intrigue, ou/et la consternation.., l’euphorie ?! Ce qui compte et en fin de compte, c’est l’effet qu’elles produisent sur le mortel au moment où il les perçoit, des images indéfinissables en sorte, excessives, particulièrement insolentes et radicales, des incomprises que je suis moi-même incapable de comprendre. 
Il s’agissait donc de tout casser : ce que vous ne pourrez pas casser vous cassera et sera votre maître, forcément. Je me contre fiche de l’histoire de l’art, des traditions et des “écoles” : je vais là où je veux, je prends fondamentalement tout, comme ça m’arrange, gloutonnement, et j’en fais des images… 
Certains vieux photographes, les moins vieux aussi, la plupart d’entre eux (tous !), revendiquent fièrement dans de soporifiques monographies “rétrospectives” leurs 30 ou 40 ou 50 ans de fidèle et traditionaliste pratique daguerrienne : bravo et qu’on leur donne des “prix nationaux”. Ces embaumés sont sinistres (et répulsifs). Tout ce bon sens qui flatte le bourgeois me donne la nausée : JE veux du “NON sens” illimité. Dans mes images, je veux les “NON valeurs” et les plus abstruses absurdités, je veux toutes les contradictions dans chacune d’entre elle et l’entrelacement de tous les contraires les plus grotesques, les imprudences les plus énergiques (donc bâtisseuses et créatrices), je veux du courage vérace : du flux vital et “atteindre sa limite dans toutes les directions avant de mourir”, s’affirmer en s’amusant (audacieusement) en choisissant les poétisations les plus corrodantes, les parures les plus grotesques qui n’obéissent à aucune tradition, à aucun code, qui n’acceptent par principe aucun système et qui permettent aux exigences profondes d’exploser au centre d’une peinture chaotique et démesurée (et déraisonnable) : l’homme comme chaos, comme butor, comme asthénie, comme enculé… 
Vers 2009, à 39 ans passés, tout était donc devenu flamboyant ! Je m’aperçu distinctement que je regardais le monde avec des yeux neufs et effrénés. 

J’ai bien l’espoir de continuer à perfectionner cette troublante allure et finir par donner, comme dans une guerre de harcèlement, grâce au dessin au trait et à la peinture, un juste reflet de ce monde de FOUS. »

L’exposition bénéficie du soutien de :
la DRAC Auvergne-Rhône-Alpes
la Région Auvergne-Rhône-Alpes
la Ville de Saint-Étienne / Saint-Étienne Métropole

French artist Jan Raymond Faust, also known as Yannick Demmerle, resides in the Oberkirch region in the heart of the Black Forest. Born in 1969, he began his artistic career as a photographer after graduating from the Esad de Strasbourg in 1996. For a decade, he lived through a decisive period in his journey in Tasmania, where his photographic practice concluded in 2009.
He then undergoes a complete transformation of his artistic identity. By abandoning photography and adopting a pseudonym, he first dedicates himself to drawing and then to collage, expressing surrealist influences with liberating energy. His finely detailed drawings, created with a fine graphite point, require careful observation. The delicate lines, sometimes barely sketched, demand a close approach to grasp the richness of his abundant universe. Chimeras intertwine in a multitude of animal forms, often drawn from the imagination of the forests of Central Europe, captured through his lens over many years. His love for literature is evident in borrowings from Céline or Schopenhauer, subtly integrated into his drawings.
Jan R. Faust’s works are part of numerous international collections, both public and private, including the Centre Pompidou, the Museum of Old and New Art (MONA)
in Hobart, Tasmania, MONAD Contemporary Art in Geneva, Switzerland, the Strasbourg Museum, and the FRAC Picardie.